Le 6 octobre 1910, le jeune Brière, élève de l'école nationale de la céramique de Sèvres, envoyait ce mot d'excuse à son directeur : « J'ai l'habitude de prendre pour venir à l'école un train qui part à 7h15 de la Gare Saint-Lazare. Ce train éprouva ce matin un retard de 35 minutes en gare de Sèvres-Ville d'Avray. Ayant demandé un certificat de retard au principal employé de cette gare à défaut du chef, celui-ci me le refusa en disant qu'il pouvait en donner par complaisance mais qu'il n'y était nullement obligé, pas plus que son chef. »

S'emparant de l'affaire, l'administrateur de la Manufacture prend sa plume le 10 octobre pour s'adresser au chef de gare : « Un élève de l'école de céramique qui, ayant pris le 6 octobre le train de 7h15 à la gare Saint-Lazare, est arrivé en gare de Sèvres-Ville d'Avray avec un retard de 35 minutes, s'est vu refuser par un de vos employés un certificat lui permettant de faire constater par nous la cause de son retard. Je suis fort étonné du refus qui m'est signalé car la délivrance de certificat de ce genre a toujours été une règle pour toutes les compagnies de chemin de fer. Je vous préviens donc que si pareils faits se reproduisaient, je me verrais dans l'obligation d'adresser une plainte à la direction des chemins de fer de l'État. »

Il faut près de deux semaines au chef de gare pour lui répondre : « J'ai l'honneur de vous accuser réception de votre lettre du 10 courant, par laquelle vous me signalez le refus opposé à un de vos élèves de lui délivrer une attestation permettant de justifier de son arrivée tardive, en raison du retard à l'arrivée à notre gare du train n°307 du 6 octobre. Je ne peux que regretter cet incident qui s'est passé à mon insu, étant en congé du 6 au 8 et mon service étant assuré par un employé surnuméraire, sans quoi le fait signalé ne se serait pas produit, ayant déjà eu maintes fois l'occasion de délivrer, sur la demande des intéressés, l'attestation demandée en pareil cas ».

Et avant de conclure, le zélé employé ne manque pas d'envoyer une pique : « Le train 307 du 6 octobre avait un retard de 30 minutes à son arrivée à notre gare ». Il ne faut pas la lui faire, 5 minutes c'est un siècle pour les chemins de fer ! Enfin autrefois...